`Prénom

Le nouveau :

Le cours de maths avait commencé depuis un quart d'heure, et déjà la moitié des élèves luttait contre une envie folle de piquer un somme sur la table – sous l'effet de la chaleur aussi bien que de la voix monotone du professeur le plus ennuyeux du monde – quand la porte s'ouvrit soudain, faisant sursauter la plupart des élèves et le professeur.

On vit alors entrer le proviseur, suivi d'un jeune homme visiblement trop occupé à observer ses chaussures pour s'apercevoir que des gens le regardaient.

À la vue du premier, les élèves se levèrent paresseusement, plus portés par une habitude bien ancrée que par un quelconque sentiment de respect. La vue du second éveilla un peu plus leur attention. On était en décembre ; la rentrée était passée depuis longtemps. On n'avait pas l'habitude de voir débarquer de nouveaux élèves aussi tard dans l'année. Et pourtant...

« Mes chers enfants, commença le proviseur de sa voix mielleuse qui lui avait valu le surnom de Gluant, je vous demanderai d'accueillir le plus chaleureusement du monde votre nouveau camarade, Roméo Tinnetinne. »

un fou rire prodigieux s'empara de toute la classe, certains élèves riant même sans complexes aux éclats, tandis que le professeur se mordait les lèvres pour ne pas succomber lui aussi et que le sus-nommé Roméo soupirait intérieurement :

« Et voilà. Ça recommence. »

Sur la plage :

Le soleil était en train de se coucher quand Ysaj retrouva Kepotaz, assis seul sur la plage, le regard perdu au loin. Après l'avoir cherché toute la journée, pris d'une angoisse terrible à l'idée que son frère aie pu décider de partir sans lui, il s'était rappelé que celui-ci aimait rêver en regardant la mer, là, sur la plage, au point qu'il lui arrivait d'y rester des heures.

S'asseyant à ses côtés, il lui dit doucement :

« Je t'ai cherché toute la journée, Kepo. Je commençais à me demander si tu n'étais pas parti.

• Pour aller où ? Répondit Kepotaz, le regard toujours fixé sur l'horizon. Tu sais bien que pour partir, il faut de l'argent et de l'argent, j'en ai pas. Et puis, ajouta-t-il en regardant son frère dans les yeux, tu sais bien que je peux partir sans toi. C'est ensemble qu'on l'a fait, ce rêve ; c'est ensemble qu'on doit le réaliser. »

Les deux frères n'échangèrent plus un mot, chacun plongé dans ses pensées ; Kepotaz, rêvant de sa future carrière dans un club de foot prestigieux en compagnie de son frère jumeau ; Ysaj, se rappelant avec amertume la somme qu'avait exigé le passeur et tous les obstacles qui se dressaient entre eux et le rêve de son frère. Pour Kepotaz, la mer était un pont vers une vie meilleure ; pour Ysaj, c'était un mur infranchissable.